vendredi 19 octobre 2012

PROPOS A PROPOS DE ... DUJARDIN, 26

Les termes de l' Histoire : "Ville", "Cour" (A. Dujardin, "Le passé religieux de l'Isle de France ...") 

"On a la théorie de l'histoire de sa théorie du langage." (H. Meschonnic", Langage, histoire une même théorie", p. 285)

"Des fous peuvent être historiens, des historiens peuvent être fous" (Daniel Arasse, Entretiens sur la peinture) 
"Il y a bien des sortes de fous : les fous délirants, les fous à lier, les fous rêveurs, les doux dingues, les inspirés, les idiots du village, les innocents, et puis les fous raisonnants. Ces derniers ont quelquefois la chance de passer pour raisonnables."
(Marina Yaguello, Les fous du langage)


"La frontière n' est pas toujours facile à tracer entre la raison et la folie raisonnante. C'est un fait que le jugement sur l'oeuvre d'un individu dépend de l'état des connaissances et de l'idéologie dominante à l'époque." (idem)

 Quand le sens attribué aux mots s'inscrit dans une conception du langage réduite à des réifications du savoir - celles également des autres composantes distinguées/isolées puis reliées entre elles par l'historiographie, faits, événements, objets, documents -, une linguistique du mot, effet à la fois du dualisme et du réalisme (opposé au nominaliste), l'histoire considérée hors théorie du langage, hors questionnement épistémologique, un objectivisme ; comme si elle pouvait se réduire à des événements-objets, des choses, à rendre directement accessibles, à portée de main, Histoire présentifiée, conjurée de sa fugitivité et disparition - l'angoisse du Temps non maîtrisé dans son flux, conception liée à la mort, une métaphysique, l'horizon du Sacré.
Il faut montrer le mouvement entre sens de l'histoire et sens des mots, renvoi réciproque ; l'Histoire a le sens que les discours lui donnent. Le paradoxe qui en fait un enjeu essentiel est de vouloir figer un flux ininterrompu, arrêter le Temps : on est bien dans l'utopie, et une mystique pas une science.
Donc récuser la vision des mots de l'Histoire, et l'Histoire elle-même, d'une onomastique et étymologie canoniques, comme s'il s'agissait de domaines établis en toute certitude ; alors qu'ils restent tributaires du mythe de l'origine, éclipsant l'histoire des mots dans une théorie du discours non dualiste. Idéologie d'une Histoire linéaire, contre l'Histoire elle-même, avec tout ce qu'elle comporte.

Là où l'enjeu de l'Histoire apparaît majeur, dans la mesure où elle n'est pas que la dimension circonscrite d'un passé événementiel - qui en fait paradoxalement une abstraction, au sens d'être abstraite, retirée de son contexte - mais ne peut être que rapport non seulement à l'événement historique, mais au politique, au social, à l'économique, au culturel, à l'épistémique et à l'idéologique : l'horizon du vivre, indéfini, non totalisable.
Enjeu majeur, le montre l'ancrage de l'Histoire au marxisme, par le matérialisme dialectique qui l'essentialise à sa manière, comme le fait le religieux ; réductionnisme totalisant/totalitaire (voir Meschonnic, pour Sartre à propos des notions marxistes dont il se sert : "Leur transport présuppose l'unité immédiate du politique et, par l'absence de tout problème épistémologique, où la littérature est indiscernable de l'idéologie, et où le langage est fondu à l'idéologie." ("Langage, histoire ...", p. 279)
Le risque et le paradoxe pour l'Histoire comme pour tout domaine du savoir, mais spécifiquement, est l'essentialisme, fixant/figeant des données forcément aléatoires, provisoires, toujours à revoir et corriger par la recherche constamment actualisée, la mise à jour toujours en cours de nouveaux documents textuels et de terrain. C'est le "discours du mythe", "unité - totalité - vérité", par le fétichisme du fait, de l'événement, de l'objet (: archéologie), du document (: archives), l'idéologie de "l'univocité de l'Histoire" (p. 284). Laquelle ne peut être posée dans le dogmatisme, un passage à l'idéologique, non critique, hors examen de ses présupposés ; qui en fait un Sacré.

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire